Médicaments à ARN : quelles sont les technologies financées par les investisseurs ?

Gilles Georges , formerly served as Vice President and Chief Scientific Officer at CAS

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Il y a quelques mois, nous avons partagé un certain nombre de perspectives sur les médicaments à ARN, générées par un examen de la littérature scientifique et des brevets. Depuis lors, nous avons examiné les tendances du marché dans ce secteur et, en associant des perspectives acquises par l'étude de CAS Collection de contenusTM et des données issues de PitchBook et de Pharmaprojects, nous avons pu suivre les approches technologiques et les indications soutenues par les investisseurs.

Voici sept enseignements majeurs issus de notre analyse.

1. L'investissement s'est intensifié au cours des dernières années

Conséquence potentielle du succès des vaccins à ARNm contre la COVID, le nombre d'investisseurs qui financent les thérapeutiques et les vaccins à base d'ARN a littéralement explosé depuis 2020 (figure 1). Le nombre total de laboratoires qui se consacrent à cette technologie est également en hausse, même si celle-ci est moins marquée que celle des investissements, ce qui semblerait signaler une progression du financement des laboratoires existants plutôt que celui de la création de nouvelles sociétés (figure 1).

Investissement dans les thérapeutiques à ARN, fig. 1
Figure 1. L'investissement dans les thérapeutiques à base d'ARN a connu une hausse très marquée depuis 2020 (colonnes bleues), alors que le nombre de laboratoires a augmenté de façon plus modérée (courbe de tendance jaune). Données de CAS Collection de contenus et de Pitchbook.

 

2. La plus grande partie des investissements est destinée à la R&D sur le cancer

Nous avons examiné les indications qui reçoivent les plus gros financements et constaté que les catégories majeures financées par les investisseurs sont le cancer, les maladies infectieuses et les maladies hépatiques et métaboliques. Il n'est pas surprenant de constater que le cancer est l'indication majeure qui a attiré les investissements récents (figure 2) : cela reflète la tendance plus générale du marché de la R&D thérapeutique. Cette tendance témoigne d'un léger changement par rapport à la période précédente de 2012-2016, au cours de laquelle l'essentiel des investissements ont été consacré aux maladies infectieuses et aux maladies hépatiques/métaboliques.

Fig 2
Figure 2. Les investissements récents dans les thérapeutiques à base d'ARN se concentrent sur la recherche et le développement de traitements contre le cancer. Données de CAS Collection de contenus et de PitchBook.

 

Il est intéressant de noter qu'en dépit de la forte hausse des investissements entre ces deux périodes, le nombre de brevets n'a pas connu une croissance aussi spectaculaire (figure 3), ce qui semble suggérer qu'une grande partie des investissements se concentre sur le développement des brevets existants plutôt que sur la recherche de nouvelles propriétés intellectuelles.

Fig 3
Figure 3. Contrairement aux investissements, le nombre de brevets publiés entre les deux périodes (2012-2016 par rapport à 2017-2021) n'a connu qu'une croissance modeste. Données provenant de CAS Collection de contenus.

 

3. Dans la R&D sur le cancer, l'investissement est assez équitablement réparti entre les approches à base d'ARNm, d'ARNsi et de CRISPR

Un examen plus approfondi des types d'ARN en cours de développement révèle que dans les indications concernant le cancer, le financement est assez également réparti entre les approches à base d'ARNm, d'ARNsi et de CRISPR (figure 4). Veuillez noter que nous avons inclus le CRISPR dans les thérapeutiques à ARN, car cette technologie s'appuie sur l'ARN pour son ciblage, même si certains peuvent la considérer comme différente de celle des traitements à ARN.

Fig 4
Figure 4. De 2017 à 2021, le financement du cancer est assez également réparti entre les approches à ARNM, ARNsi et CRISPR, même si dans le cas des maladies infectieuses et des maladies hépatiques/métaboliques, l'essentiel du financement est orienté vers le développement de thérapeutiques à base d'ARNm (2017-2021). Données de CAS Collection de contenus et de Pitchbook.

 

4. Dans les programmes consacrés aux maladies infectieuses et aux maladies hépatiques/métaboliques, l'ARNm est la molécule privilégiée

Contrairement aux projets de développement de traitement anti-cancéreux, les projets ciblant les maladies infectieuses se consacrent principalement au développement de vaccins à ARNm (figure 4). Le succès récent des vaccins à ARNm contre la COVID a mis en évidence la puissance et la rapidité de cette approche pour le développement de vaccins et est sans doute l'élément moteur de cette focalisation sur l'ARNm dans la recherche sur les maladies infectieuses.

Dans le cas des maladies hépatiques et métaboliques, l'ARNm est également la molécule privilégiée par les investisseurs, même si à la date de rédaction de cet article, les quatre thérapeutiques à ARNsi approuvées par la FDA aux États-Unis - patisiran, givosiran, lumasiran et inclisiran - ciblent toutes la production d'enzymes dans le foie.

5. L'investissement récent dans toutes les indications soutient principalement l'ARNm et l'ARNsi, même si davantage de produits à ARNsi que de produis à ARNm sont dans le pipeline

Dans toutes les indications, l'ARNm reçoit l'essentiel de l'investissement (figure 5A) et, même si de nouveaux produits à ARNsi étaient présents dans le pipeline entre 2017 et 2021 (figure 5B), la situation a changé en 2022, le nombre de produits à ARNm dans le pipeline surpassant très nettement celui des produits à ARNsi, selon les données de Pharmaprojects.

Toutefois, lorsqu'on combine ces informations avec un examen de la littérature, on constate que les formes plus récemment décrites d'ARN, telles que l'ARNcirc, l'ARNInc et les ARN exosomaux suscitent un intérêt croissant (figure 6). Il sera intéressant de voir l'impact éventuel de ces nouveaux types d'ARN et la rapidité avec laquelle ils passeront en phase de développement.

 

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Fig 5b Fig 5a

Figure 5. L'investissement récent soutient principalement l'ARNm (A), alors que les produits à ARNsi sont plus nombreux dans le pipeline (B). (Données de A issues de Pharmaprojects et données de B provenant de PitchBook)

Fig 6
Figure 6. Les ARN récemment décrits, tels que l'ARNcirc, l'ARNInc et les ARN exosomaux, connaissent la croissance la plus rapide en termes de nombre de publications dans les revues et de brevets. Données de la collection de contenus CAS.
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6. La plupart des laboratoires qui développent des produits à ARN se concentrent sur un seul type d'ARN et ciblent de multiples indications

En examinant les principaux laboratoires qui développent des thérapeutiques à ARN, nous avons constaté qu'à l'exception d'AstraZeneca, ils se concentrent tous sur le développement d'un seul type d'ARN (tableau 1) et appliquent leur technologie majeure à une grande diversité d'indications (tableau 2).

Tableau 1. La plupart des laboratoires se concentrent sur un seul type d'ARN

ARN messager AstraZeneca
BioNTech
Cartesian Therapeutics
Moderna
Stemirna Therapeutics
ASO AstraZeneca
Ionis Pharmaceuticals
Sarepta Therapeutics
siRNA Alnylam Pharmaceuticals
Arrowhead Pharmaceuticals
AstraZeneca
Dicerna Pharmaceuticals
Silence Therapeutics
Sirnaomics
Aptamer (ARN) TME Pharma (anciennement NOXXON Pharma)
miRNA AstraZeneca
CRISPR Beam Therapeutics
CureVac

Tableau 2. La plupart des laboratoires appliquent leur technologie à de multiples indications.

Alnylam Pharmaceuticals Maladies infectieuses, neurologiques, hépatiques, cancer, affections rénales, maladies du sang
Arrowhead Pharmaceuticals Maladies infectieuses, neurologiques, hépatiques, cancer
AstraZeneca Maladies cardiovasculaires, hépatiques, métaboliques, cancer
Beam Therapeutics Maladies oculaires, hépatiques, cancer, maladies du sang
BioNTech Maladies infectieuses, cancer
Cartesian Therapeutics Maladies neurologiques, respiratoires, auto-immunes, cancer
CureVac Maladies infectieuses, cancer
Dicerna Pharmaceuticals Maladies infectieuses, hépatiques, troubles liés à l'abus d'alcool, néphropathies, maladies du sang
Ionis Pharmaceuticals Maladies oculaires, infectieuses, neurologiques, hépatiques, acromégalie, affections auto-immunes, cancer, néphropathies, maladies du sang
Moderna Maladies infectieuses, cardiovasculaires, hépatiques, auto-immunes, cancer
Sarepta Therapeutics
Maladies neuromusculaires
Silence Therapeutics Maladies cardiovasculaires, cancer, maladies du sang
Sirnaomics Maladies infectieuses, respiratoires, hépatiques, cancer, maladies du sang
Stemirna Therapeutics Maladies infectieuses, cancer
TME Pharma (anciennement NOXXON Pharma) Transplantation, maladies auto-immunes, cancer, néphropathies, maladies du sang

7. L'investissement global dans les produits à ARN a nettement diminué en 2022 par rapport à 2021

Une remarque intéressante concernant les tendances d'investissement récentes concerne la réduction significative de l'investissement global en 2022 par rapport à 2021 (figure 7). Cette réduction semble principalement due à une diminution de l'ampleur des opérations de fusion et d'acquisition (F&A), car leur nombre total a été divisé par deux.

Fig 8
Figure 7. On a constaté une réduction majeure de l'investissement dans les programmes d'ARN en 2022 par rapport à 2021, principalement en raison d'une diminution de la taille des opérations de F&A.

 

Un regard plus approfondi sur la science des technologies financées

La hausse de l'investissement dans les thérapeutiques à ARN représente un fort potentiel de développement de nouvelles options de traitement de maladies actuellement incurables, notamment de cancers, de maladies infectieuses, hépatiques et métaboliques et de maladies rares. Toutefois, de nombreux obstacles doivent encore être surmontés, en particulier en ce qui concerne la stabilité de l'ARN, sa biodisponibilité et le ciblage des tissus. Pour en savoir plus sur les défis de la commercialisation et les stratégies utilisées pour les surmonter, lisez notre livre blanc qui présente des perspectives issues de CAS Collection de contenus. « Médicaments dérivés de l'ARN : un examen des tendances et des développements de la recherche. »